Faire émerger de la valeur dans l’incertitude

L’incertitude vient souvent d’un environnement qui fait des vagues ou même carrément inconnu notamment quand le développement d’un produit s’étend sur plusieurs années comme dans l’automobile, le secteur militaire ou le BTP. Elle provient aussi de la versatilité croissante des clients, soumis aux modes éphémères. Bref, on est cerné par l’incertitude. Et si la mauvaise nouvelle est que la prise de décision devient complexe et la création de valeur délicate, la bonne nouvelle est que l’avenir changeant offre des opportunités à ceux qui savent anticiper les signaux faibles et transformer la volatilité en source de valeur.

Promenons-nous dans l’avenir

La description de l’avenir est souvent perçue, à tort, comme une prédiction soumise immédiatement à l’examen critique : « Comment être certain que cela se produira ? ». En effet, tout est flou et changeant, qu’il s’agisse des hypothèses, des dynamiques, des catastrophes ou bien des surprises.

Face à cette incertitude, il devient utile de structurer ce flou afin de construire un terrain de jeu de demain, un espace dans lequel il est possible d’évoluer collectivement et de se promener ensemble. L’objectif n’est pas d’anticiper précisément la réalité de demain, mais plutôt de défricher un espace de réflexion, d’imaginer un paysage concerté du futur composé de champs de valeur choisis pour leur pertinence et leur capacité à séduire les clients, à donner du sens.

L’avenir devient ainsi plus accessible, car il se limite à cinq ou six champs de valeur, sélectionnés pour leur importance sociétale ou pour leur potentiel à renforcer le sens de la marque. Ces champs de valeur sont envisagés comme des axes temporels, réunissant des produits & services qui s’inscrivent dans une même ambition, tout en faisant appel à des technologies variées. Par exemple, un constructeur automobile pourra intégrer dans le champ de valeur « se rencontrer » un service comme « don d’ubiquité avec un avatar », dépassant son domaine traditionnel, aussi bien qu’un produit tel que le « robot-taxi monoplace», qui s’inscrit dans la continuité de son expertise.

Ces champs de valeur, ainsi que les produits & services qui les composent, seront régulièrement ajustés et modulés pour tenir compte des nouveautés et des signaux faibles qui émergent à chaque révision. Au fil du temps, il s’avérera que certains champs de valeur se révèlent plus nourris, plus robustes ou plus stables que d’autres. Il devient alors possible de leur accorder davantage de poids, de les renforcer et de choisir de se positionner à l’avant-garde ou, au contraire, de prendre du recul.

C’est au sein de ce terrain de jeu de l’avenir que la création et la recherche de valeur prennent tout leur sens. Toutefois, avant de s’y engager pleinement, il convient d’apporter un peu de consolidation à cette démarche.

Consolider l’avenir par les réglementations, normes et partenariats

Pour donner de la solidité à ce futur incertain, il est essentiel d’intégrer les contraintes réglementaires et certaines normes dans le terrain de jeu du futur qu’elles soient avérées ou en cours d’étude. Ces éléments constituent des points d’ancrage stables, tout en révélant d’éventuelles exigences à challenger via le lobbying. Les partenaires et acteurs d’écosystèmes connexes jouent également un rôle clé dans la consolidation de cette vision partagée du futur. Illustrant cette démarche, la Red Team de la Défense associe auteurs, artistes, experts scientifiques et militaires pour imaginer les menaces futures visant la France ou ses intérêts. Construire ce terrain de jeu du futur avec des partenaires, des fournisseurs, des studios de tendance ou des artistes enrichit et sécurise la démarche. Celle-ci gagnera peu à peu en force par sa dynamique collective et sa révision dans le temps.

Classer la valeur

Les produits & services déployés dans les champs de valeur peuvent maintenant prendre de l’épaisseur en les répartissant dans trois catégories de valeur : « socle », « on-the-top » et « cerise sur le gâteau »

• Le socle est une base, structurellement bâtie pour absorber les réglementations & normes, en intégrant même certains standards métiers ou consumer. C’est un fondamental. Partagé par la profession, il évolue lentement, il est calmement au gout du jour, ce qui garantit sa pérennité. De bonne qualité, il a pour principal bénéfice sa fraicheur lentement continue. C’est un morceau de confiance. Incontournable, il a peu de valeur, il faudra donc optimiser son cout par la transversalité et la mutualisation. Louper ce socle, c’est se mettre hors compétition et créer de la dévaleur. Imposer ce socle, c’est être leader pour un temps. Collaborer à ce socle, c’est gagnant, rassurant et robuste.
• On-the-top : Cette catégorie englobe un type de produits & services non-normé, agile à suivre la mode, adapté aux attentes changeantes des clients. Plutôt innovant, c’est sur lui que se concentre la création de valeur, il fait la différence, et pour le client, il est sa préférence. Porté par la marque et la culture d’entreprise, il crée de l’attachement. Spécifique à chaque acteur, il s’adapte aux évolutions locales et court-terme, incarnant la séduction et la modernité. Alors que le socle est pour tous, on-the-top est pour chacun. Il sera décidé le plus tard possible.
• La cerise sur le gâteau : Véritable pépite, elle se distingue par son unicité et son pouvoir d’attraction. Fortement reliée à la marque, elle est séduisante et sait, d’un coup, emporter le choix du client, qu’il s’agisse d’une couleur, d’une odeur ou d’un détail marquant. Elle a une valeur immense, elle donne de l’âme au produit et une identité à la marque.

Et la puissance du « un peu » ?

La création de valeur en environnement incertain repose ainsi sur l’identification des champs de valeur les plus robustes et le développement des produits & services « on-the-top » ou « cerise sur le gâteau » à fort potentiel. Cette structuration originale facilite la prise de décision, encourage l’innovation tant produits & services qu’organisationnelle. Elle permet la réallocation des efforts vers ce qui compte réellement. Comme une petite astuce, on pourra aussi adopter la philosophie « un peu » qui consiste à empiler plusieurs mini-solutions, elles-mêmes plus faciles à approcher, elles coopèrent par touches successives, s’effeuillent aussi, ou combinent le virtuel et le réel pour construire une solution complète mais légère et adaptable. Elle valorise le service sur le produit, l’évanescence, la superposition, autant d’axes à explorer pour créer de la valeur dans l’incertitude.